top of page

Propreté à la crèche : et si le stress des grands bloquait les petits ?

  • Photo du rédacteur: Bénédicte Tricot
    Bénédicte Tricot
  • 19 juin
  • 4 min de lecture

Dernière mise à jour : 2 juil.


un enfant sur le pot

Chaque année, à l’approche de la rentrée scolaire, je sens poindre une tension bien particulière dans l’air. Ce n’est pas chez les enfants qu’elle s’installe… mais chez les parents. Et, doucement mais sûrement, elle glisse jusque dans nos équipes. Car oui, dès la fin du printemps, un mot revient en boucle dans les couloirs : la propreté.

C’est un mot qui, je dois le dire, déclenche bien des émotions. On entend des phrases un peu raides, des attentes qui s'emballent, et beaucoup d’injonctions. « Il faut qu’il soit propre pour la rentrée ! »… Et nous voilà, professionnels, à accompagner l’enfant au plus juste tout en tentant d'apaiser les inquiétudes parentales. L'accompagnement de la propreté à la crèche ... c'est tout un art...


La propreté, ce n’est pas un apprentissage… c’est une maturation


Je l’ai souvent entendu : « On a commencé l’apprentissage de la propreté ». Et chaque fois, je me dis qu’on confond un peu tout. Comme si "devenir propre" ( parce qu'avant on ne l'était pas? ) se transmettait comme une recette de gâteau. Les parents avides de conseils vont chercher dans les livres ou leur entourage ... qui ne connaissent pas aussi bien leur enfant qu'eux.

Mais la vérité, si difficile à expliquer à des parents sous pression sociale , c’est que l'acquisition de la propreté ne s’enseigne pas. Elle se vit ( de façon positive au risque de créer des blocage ...) , s'accompagne jusqu'à ce l’enfant soit prêt, quand il commence à percevoir ce qui se passe en lui, à anticiper, à ressentir et à vouloir se consacrer à un nouvel apprentissage passionnant. C’est une construction interne, une maturité neuromotrice, affective, émotionnelle… qui ne suit pas toujours le calendrier scolaire.

Alors oui, parfois il est sec. Mais ce n’est pas pour autant qu’il comprend ce qui se passe. Il expérimente. Il tâtonne. Il construit. Et ce n’est pas parce qu’on enlève la couche que tout est intégré, surtout s'il n'en parle pas du tout ou ne montre pas son intérêt.


Quand l’angoisse des parents déborde…


Souvent, derrière les injonctions des parents, je perçois surtout de l’inquiétude. Et comment ne pas les comprendre ? Le spectre de l’école, les discussions de parc, les comparaisons, les conseils bienveillants mais maladroits… tout cela alimente une peur : celle que leur enfant ne soit pas « prêt », et donc « pas accepté ».

Le problème, c’est que cette peur-là peut rendre les adultes sourds aux besoins réels de leur enfant. On propose alors des pratiques qui nous semblent logiques à nous — adulte — mais qui peuvent créer de vraies tensions pour l'enfant: rester longtemps sur le pot, enlever la couche trop tôt, réagir avec déception ou agacement à un accident.


Et pourtant… l’enfant, lui, n’a rien demandé. Il est juste au milieu de ces "combats" d'adultes, à essayer tant bien que mal de grandir à son rythme. D'autant que cet "apprentissage" tombe à la même période que la phase d'opposition où il s'affirme et teste son pouvoir sur le monde qui l'entoure ! D'ailleurs ...le sommeil et les repas sont ses 2 autres leviers qui sont (ô coïncidence ?) des sujets très présents lors des transmissions ...


Et pourtant, il n’existe pas de loi interdisant à un enfant en couche d’entrer à l’école! Certaines écoles sont très ouvertes sur le sujet d'ailleurs, et d’autres moins. Ce flou, ce manque d’harmonisation, crée du stress. Pour les parents, mais aussi pour nous, professionnels.

D’où l’importance de tisser ce lien avec l’école, de connaître les pratiques locales que les parents n'ont pas forcément osé demandé de peur de stigmatiser leur enfant, d’ouvrir le dialogue. C’est aussi une belle occasion de renforcer la passerelle éducative et d’impliquer les familles dans une démarche plus sereine, plus réaliste. Pourquoi ne pas anticiper dès le début de l'année par des affichages et des café parents? 


Propreté à la crèche : le projet éducatif comme repère


Dans ce climat souvent chargé, le projet éducatif peut devenir un véritable point d’appui. Lorsqu’il est construit collectivement, qu’il est vivant, relu, partagé… il permet de poser les choses.

Il rappelle à tous que notre mission première, c’est le bien-être de l’enfant. Qu’on ne force pas, qu’on n’accélère pas, qu’on n’oblige pas. Il permet aussi de faire comprendre aux parents que nos choix pédagogiques sont réfléchis, argumentés, construits avec l’équipe. Et qu’ils s’inscrivent dans une continuité.

Cela permet à chaque membre de l'équipe de se sentir soutenu, de se savoir en cohérence avec l'établissement donc moins seul. Ses émotions plus posées dans les échanges avec les parents influeront sur les émotions des parents et permettront plus aisément une discussion autour de stratégies communes.


L’écoute active : un pont entre les mondes


Dans ces moments où les positions peuvent sembler opposées, l’écoute devient fondamentale. Une écoute sincère, sans jugement. Celle qui accueille les inquiétudes sans les nier. Celle qui reformule pour mieux comprendre.

Et surtout, celle qui ouvre des pistes, pas à pas. Un essai sur quelques jours. Une pause si l’enfant montre des signes de fatigue. Le choix de ne plus en parler pendant un temps. Toutes ces petites stratégies, discrètes mais puissantes, peuvent redonner de l’espace à chacun surtout si elles proviennent d'un véritable échange avec les parents, de la prise en compte commune de la réalité de chacun. 



Et si on passait par le jeu ?


On l’oublie trop souvent dans tout ce stress , mais le jeu est un incroyable levier de développement. Et en matière de propreté, il a beaucoup à offrir. Les jeux de transvasement, par exemple, permettent à l’enfant de vivre l’expérience du plein, du vide, du passage d’une matière d’un contenant à un autre… tout en constatant que rien ne disparaît, que le contenant reste le même.


Cela peut sembler anodin. Mais pour un enfant qui découvre que son corps produit quelque chose qu’il « perd », cette visualisation est profondément rassurante. Elle structure, elle contient, elle rend tangible ce qui lui échappe encore.

Et surtout, elle permet de sortir des tensions, de remettre de la joie, de la légèreté. Parce que la propreté peut aussi se vivre dans le plaisir.


Conclusion : accompagner, toujours, avec patience et confiance

Finalement, cette étape de la propreté, si chargée symboliquement, est aussi une magnifique occasion de redire ce qui compte : la confiance, la sécurité affective, le respect du rythme de chacun.

Oui, cela demande du dialogue avec les familles. Oui, cela demande de connaître finement le développement de l’enfant. Mais c’est justement là que notre métier prend tout son sens.

コメント


この投稿へのコメントは利用できなくなりました。詳細はサイト所有者にお問い合わせください。
bottom of page